D'une rencontre à l'autre, d'un Trickster à l'autre

Par Jani Greffe-Bélanger

Coordonnatrice Trickster

 

Mai 2013, je reçois mon diplôme de l’UQAM. Quelques mois plus tôt, j’avais mis les pieds chez Exeko comme stagiaire pour le volet Art et DI, et depuis je pouvais affirmer savoir vouloir travailler pour cette organisation qui m’avait touchée droit au cœur dès les premières heures. Chose fantastique, j’avais eu la confirmation que je continuerais l’aventure exekienne au delà de mes mandats de stage comme médiatrice intellectuelle et culturelle.  Je ne pouvais pas me douter que quelques semaines plus tard, j’envisagerais de conduire une caravane dans la rue allant à la rencontre des Autochtones en situation d’itinérance et encore moins qu’au mois de juillet j’allais partir à Kitcisakik en Abitibi-Témiscamingue pour le programme Trickster

 

À Kitcisakik (c) Exeko

 

Juillet 2013, j’arrive à Kitcisakik. Dans la rue, les jeunes jouent, se chamaillent, courent avec les chiens et les adolescents sont… nous ne savons pas où ! Jusqu’à tard le soir, Manu, Marc-André et moi sillonnont la rue à la rencontre de cette charmante marmaille qui se lance sans hésitation dans la jonglerie et les acrobaties. C’est ainsi qu’on te rencontre pour la première fois toi, S. Tu n’as pas froid aux yeux et rapidement tu montes sur les épaules de Marc-André en toute confiance, le mettant constamment au défi. Une histoire d’amour commence. Tu passeras le reste des deux semaines à te coller à lui. Une vraie histoire avec des hauts et bas, où tout n’est pas toujours facile. Où se dire je t’aime mon ami, se fait d’une bien drôle de manière, mais avec authenticité. C’est avec une grande fierté qu’on te voit évoluer au travers ce programme.

 

C’est aussi la première fois où je rencontre un autre ami désormais bien connu, le sentiment d’imposteur. C’est aussi comme par magie que ta petite bouille toute fière, un certificat soulignant ta participation en main, me montre que le partage, l’échange, le dépassement de soi et la patience font de bons résultats. De sentiment d’imposteur, je passe à celui d’apprentissage. Bienvenue chez Exeko Jani, S. vient de t’inclure socialement.

 

 

À La Tuque (c) Exeko

 

À peine revenue, on m’apprenait que je repartirais à l’automne, mais pour la Mauricie. C’est ainsi qu’au mois d’octobre, je faisais 4 heures de route avec Bruno et Cyril pour arriver au Centre d’amitié autochtone de La Tuque où une équipe des plus accueillantes nous attendait. Entre une bannique et une délicieuse soupe, on te présente à l’équipe, toi, J. Une cigarette au bec, le regard au sol, tu es des plus gênés, mais tu sembles ravi de pouvoir troquer tes heures de programme en employabilité avec nos ateliers de cirque et de théâtre. C’est la première fois que j’aurai à faire un Trickster avec des stagiaires. Je te tends nerveusement l’appareil photo à la première rencontre, ne sachant pas trop ce qui te plairait. Tu l’attrapes avec le sourire et le dos appuyé au mur tu commences à prendre en photo les participants. Puis de rencontre en rencontre, tu déposes peu à peu l’appareil pour tenter de jongler ou pour parler aux participants en Atikamekw afin de les encadrer ou les motiver. Papier en main, tu arrives à animer un atelier en milieu de parcours. Tu as une activité de préparée et tu aimerais bien la tester.

Plus les jours passent, plus tu prends ta place et des initiatives. Tu es un leader, un motivateur et un modèle pour les autres jeunes. À la générale, un peu dépassés par les évènements, nous avons du mal à garder l’attention du groupe. Avec calme et confiance, tu t’adresses à eux, livrant le plus beau, efficace et touchant « peptalk » que j’ai pu entendre à ce jour.

C’est avec émotion et fierté que j’ai appris que tu t’étais joint au Trickster « prise deux » qui a eu lieu cet hiver. En plus de participer aux ateliers Trickster, tu as fait profiter tes réflexions au groupe idAction et tu as campé le personnage principal dans le spectacle final… À toi petit sage, tes paroles et ton vécu m’ont permis de mieux comprendre mon métier et surtout de faire confiance au temps et au silence. Si tu savais comment ça me sert.

 

À Lac-Simon (c) Exeko

 

Février 2014, un retour en Abitibi-Témiscamingue, mais cette fois au Lac-Simon. J’ai les jambes qui tremblent et les mains moites. J’ai peur de n’être qu’un feu de pailles de deux semaines. Tu es entré comme une bombe à l’atelier découverte, dynamique J. Une bombe qui a explosé au cours de l’heure. La patience était au rendez-vous, puisque nous t’avions que pour une seule période. Quelle surprise de te voir revenir le soir comme participant Trickster. Un peu intimidée devant une trentaine de jeunes, je te remarque puisque cette fois, tu es calme, concentré, intéressé, souriant et talentueux. Dès les premiers ateliers, tu arrives à faire d’impressionnantes acrobaties et à jongler comme un pro. Ces trois balles seront à partir de ce moment tes meilleures amies, celles qui t’épauleront lors des moments plus durs. Fascinée, je te regarde évoluer durant ces deux semaines, utilisant toujours les balles comme éléments raccrocheur. Bruno, Marie KriKri et moi, sommes touchés de te voir revenir après chaque obstacle, malgré le quotidien qui te malmène un peu. Capuchon bien posé sur la tête, tu refaisais toujours surface, l’estime dans les talons et c’est à grand coup de jonglerie que le capuchon tombait et le sourire revenait. Au spectacle final, surprise et heureuse de te voir participer, D. te donne sa place avant d’entrer sur scène, te faisant confiance et voulant partager ces beaux moments. L’équipe Trickster est touché droit au cœur. Quelques minutes plus tard, je te retrouve assis, admirant ton certificat, surpris de mériter cela. Tu lèves les yeux vers moi et tu me dis : « Hey… Je ne suis pas venu pour rien moi… ». Merci à toi, pour toute cette reconnaissance, pour ta confiance, pour ta vérité, mais surtout pour ta persévérance !

 

À Mingan (c) Exeko

 

Mingan mars 2014. Les tempêtes de neige s’enchainent sur la Côte-Nord, l’équipe que nous faisions Mathieu, Isa et moi rencontrent de nouveaux défis imposés par l’honorable Mère Nature. Tu es là dès notre arrivée, un peu à l’écart, mais tu participes tout même, du moins tout autant que tes camarades. Tu me mentionnes que tu ne pourras pas être là demain, puisque tu es maman. Je t'explique que ta puce est la bienvenue. Tu reviendras à chaque rencontre, trouvant toujours le moyen de la faire garder. Je salue ton sens de l’organisation. De jours en jours tu perfectionnes ta technique de jonglerie. Au spectacle, je t’observe te faire maquiller par Mathieu, l’un en face de l’autre dans un silence renversant, dans un laisser-aller saisissant. Tu te laisses maquiller doucement. Derrière la console de son, appareil photo en main, je te regarde devant ta communauté jongler avec brio et facilité. Le lendemain, c’est l’heure du départ, les aurevoirs se font en silence, mais avec les plus gros des câlins. Lorsque je te demande si tu apprendras à jongler à ta fille, tu réponds d'un large sourire. Tu le maîtrises bien le silence, merci de m’avoir appris à me taire quand il le faut et questionner quand c’est nécessaire. Suffit parfois d’apprécier le moment présent sans trop penser.

Presque un an s’est écoulé depuis mes premiers pas dans le projet Trickster. Je regarde l’année à venir avec autant d’excitation que celle qui vient de passer. Je suis toute aussi nerveuse à l’idée de partir dans d’autres communautés, toute aussi insécure et mon sentiment d’imposteur cogne toujours à ma porte. Quand je repense à vous, mon courage revient. Rien de tout cela serait possible, rien de tout cela serait aussi magique, sans vous. Merci à vous petits participants Trickster de mon tout cœur, de faire de mon métier, le plus beau du monde. Il fait bon être et apprendre à vos côtés. 

exeko.org/trickster

Cultiver la pensée des leaders en herbe... Exeko x Club des Petits-Déjeuners

Par Youssef Shoufan et Marie-Paule Grimaldi, médiateurs

Les programmes idAction et Trickster d’Exeko étaient présents pour un troisième Camp de Leadership du Club des Petits Déjeuners, cette fois avec de jeunes leaders venus de partout au Québec. Créant de nouveaux ateliers et en reprenant d’anciens, la panoplie des outils de médiation intellectuelle ou des jeux de communication et d’expression en main, les médiateurs Marie-Paule Grimaldi et Youssef Shoufan et l’artiste-intervenant Maxime Larose étaient prêts, avec autant d’énergie que celle des enfants! L’équipe fut aussi bonifiée par la présence de Maxime Goulet Langlois et Nadia Duguay, venus en observation mais ne pouvant rester très longtemps à l’écart de cette belle communauté spontanée formée autour de 44 jeunes de 10 à 14 ans.

Il n’a pas fallu beaucoup de temps pour commencer à réfléchir, ou à s’amuser. À l’aéroport, on sort les balles à jongler et notre plus bel esprit clown - contagieux - pour entraîner les enfants dans les danses de bienvenue. Et déjà dans l’autobus en route vers Quyon, une première énigme est lancée par Youssef. La réponse était peut-être importante, mais ce qui l’était le plus, c’était tout simplement le fait de réfléchir et de faire fonctionner le cerveau. Sans plus tarder, Maxime, un des jeunes leaders, se lève à son tour pour prendre la parole au micro et poser une de ses énigmes à tout le monde dans l’autobus! Pendant ce temps, pour faire une première cartographie de ce qui nous unit et de la diversité des idées présentes, Marie-Paule fait passer une feuille où chacun inscrit la valeur la plus importante à ses yeux, une question pas si facile. La balle de la réflexion est lancée.

Pendant les six jours bien remplis du camp, deux moments étaient plus spécifiquement destinés aux ateliers idAction et un à Trickster, alors que plus de 40 jeunes étaient amenés à réfléchir et à donner leurs points de vue, à expérimenter les défis de la communication, de la confiance et de la prise de décision, les deux programmes d’Exeko faisant écho l’un à l’autre.

(c) Exeko

Un leader, c’est fait de quoi?

Cet atelier ayant fait fureur lors du dernier Camp de Leadership à Parry Sound et rejoignant si bien le thème de l’aventure, il n’était pas question de s’en priver à Quyon! Le soir du deuxième jour, après avoir couru à bout de souffle pendant le très populaire jeu de La Grosse Roche, tous les jeunes étaient réunis dans la salle principale du dortoir des filles pour cette première séance idAction.

Tout d’abord, Youssef et Marie-Paule mettent la table et présentent Exeko et ses visées. Il importe également de donner les paramètres du terrain de réflexion: dans un esprit d’inclusion, tout le monde n’est pas obligé de participer mais l’écoute et le respect sont de mise. On discute de points de vue et on ne fait pas d’attaques personnelles, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses, toutes les idées sont les bienvenues, mais il faudra argumenter…

Les questions sous-jacentes à l’atelier examinent les éléments qui peuvent constituer le leadership, mais aussi à savoir si ce leadership émanerait d’un dispositif intérieur ou d’une structure externe. Pour rendre l’approche accessible à nos leaders en herbe, nous présentions différentes images de personnalités publiques ou de figures d’autorité: Carey Price, Marie-Mai, Youssef (!), mais aussi une policière et une vieille dame… Est-ce le rôle, le pouvoir, la popularité ou l’expérience qui fait le leadership? Un leader doit-il faire l’unanimité? Un leader est-il choisi par les autres, reconnu comme tel ou à travers un processus démocratique, ou s’impose-t-il (ou elle) par ses qualités, son charisme et son audace?

La discussion s’enflamme joliment. Passionnés, les jeunes comme les moniteurs se sentent interpellés et réfléchissent le monde bien au-delà du thème suggéré, en touchant aux questions de préjugés et de discrimination, de manipulation de l’image et de communication non-verbale… L’atelier se termine mais les idées continuent leur chemin!

(c) Exeko

Communiquer à la mesure de l’autre

Au jour 3, nous allons dans le local de musique pour l’atelier de Maxime Larose. Même si celui-ci a déjà fait faire plusieurs jeux mettant en action les enjeux de la communication, de l’expression et de la confiance, ceux-ci n’ont jamais été explicites. Pendant son atelier, on s’amuse encore, mais les défis sont tangibles: si communiquer c’est bien s’exprimer, c’est aussi s’assurer de l’écoute, de la compréhension et de la connexion à l’autre.

On se lance des balles en groupe sans parler, par le contact visuel, puis une personne de groupe se tourne, sans voir les autres. Le reste du groupe a un assemblage de legos qui doit être décrit au jeune qui ne le voit pas pour qu’il puisse le refaire. On est aussi dans le travail d’équipe! Puis c’est le jeu de l’aveugle, où deux par deux, l’un doit guider l’autre à travers le gymnase. S’il est toujours question de la clarté d’expression, la confiance est aussi des plus importante…

L’atelier d’inspiration Trickster passe trop vite, et on poursuit la réflexion pendant la collation. Qu’est-ce qui a été difficile? Quels éléments facilitaient les jeux? Pour les jeunes du camp qui cherchent à faire une différence dans le monde qui les entoure, ces expérimentations mènent à des prises de conscience et des ajustements essentiels.

Expérience du partage

Pour introduire le deuxième atelier idAction, nous avons commencé par un retour sur le souper de la veille, un souper un peu fou, où non seulement l’ordre des plats était mélangé, mais où les ustensiles n’avaient pas leur place.

L’expérience a bien amusé tout le monde, mais la réflexion est allée plus loin. Est-ce qu’on peut se permettre de parfois «briser les règles»? Est-ce que certaines personnes doivent constamment manger sans leurs mains? Est-ce qu’il y a certains endroits dans le monde où nous mangeons culturellement avec les mains?

Toutes des questions qui ont pu élargir les façons de voir les choses, avant de regarder cette vidéo d’une expérience réalisée avec de jeunes enfants.

 

 

Et vous, qu’auriez-vous fait? «J’aurais partagé mon plat», «J’aurais goûté en premier», «J’aurais fait un nouveau sandwich» ont répondu les jeunes, permettant de présenter les différentes façons d’agir face à une même situation.

Grâce à cette vidéo, des questions plus approfondies ont aussi pu être abordées: «Est-ce qu’on pourrait aussi partager avec la dame ou le photographe qui s’en vient? Est-ce que nous sommes prêts à partager avec des gens qui sont loin de nous ou que nous ne connaissons pas? Qui devrait décider du partage? Comment devrions-nous partager les richesses?»

Suite à cette dernière question, nous sortons dehors pour un autre jeu proposé par Maxime où le processus décisionnel de groupe et individuel est appliqué. Dans le jeu de l'ascenseur, chaque équipe doit choisir un butin à offrir pour convaincre les autres de venir les rejoindre. Partage et choix d’idées, définition de richesse, tout en bougeant et en riant, la discussion et les pensées prennent vie, dans un très bel alliage des approches idAction et Trickster.

Des questions qui ont apporté des réflexions et discussions très intéressantes, et qui sont restées dans la tête des gens lors des autres repas au camp (ex: lorsqu’on mangeait des hamburgers avec les mains!).

Des façons de voir les choses qui nous ont habité tout au long de leur séjour et qui risquent aussi de suivre les jeunes en dehors du Camp de Leadership.

(c) Exeko

Suite aux ateliers, nous ne rations aucune occasion de poursuivre le filon de la pensée philosophique. Même pendant le jeu des Yétis, alors que les moniteurs déguisés devaient se faire attraper par les enfants et leur lancer un défi en échange de trésors à accumuler, Marie-Paule leur demandait de lui poser une question philosophique. Pas une question de biologie, de physique ou d’histoire, ce qui représentait un défi. Les réponses-questions furent enchantantes, par exemple: «Pourquoi les enfants rendent les adultes ou parents affectueux?» et encore, «Pourquoi la vie est belle?»

Poussant encore plus loin son implication, cette troisième expérience d’Exeko avec le Club des Petits Déjeuners a été concluante, formidable et encore une fois riche de possibilités pour ce partenariat. En plus, les bénévoles, les intervenant(e)s, l’équipe du Club des Petis Déjeuners ainsi que le personnel du Camp des Voyageurs de Tim Horton qui nous accueillait... tous sont des personnes exceptionnelles, passionnées par leur métier, et déterminées à faire une différence dans la vie des jeunes qu’ils rencontrent. Pendant six jours, tout convergeait pour offrir un impact positif sur les jeunes leaders. Et à les voir s’épanouir, à échanger les sourires, à les entendre poursuivre les pistes lancées dans leurs discussions, nous savons que la récolte est et sera abondante.

 

Découvrez idAction, Trickster, et venez à la rencontre de l'équipe d'Exeko lors du prochain 5@7 présentant la médiation intellectuelle! 

Dialogues interculturels à bord d’idAction Mobile

Par Marie Pierre Gadoua, médiatrice idAction Mobile

 

À bord de la caravane philosophique d’Exeko, nous avons la chance de côtoyer dans une même soirée des gens de cultures et d’identités autochtones (et aussi non-autochtones) extrêmement variées. Algonquins, Atikamekw, Cris, Innus, Inuit, Mi’kmaq, Mohawk, Ojibwé, et j’en passe, font partie des participants avec qui nous travaillons régulièrement, et ce simultanément. Une situation unique, si nous pensons aux distances qui séparent habituellement leurs communautés d’origine sur le territoire québécois et canadien.  Avec notre outil qu’est la médiation culturelle et intellectuelle, ces rencontres représentent une opportunité pour réfléchir ensemble à d’importantes questions sur la culture et l’identité, leur définition, leur expression et leur transmission, ainsi que la perception d’autrui et les relations (et absence de relations) interculturelles dans le milieu urbain que nous partageons.

 

Afin de stimuler ces discussions et de les partager avec le public, idAction Mobile a débuté il y a deux semaines une collaboration avec le Musée McCord, en lien avec son exposition permanente mettant de l’avant sa collection des Premiers Peuples du Canada, intitulée « Porter son identité ». Nous avons créé un catalogue qui présente une sélection d’objets du McCord, afin de provoquer des discussions sur l’identité (en avons-nous une seule ou plusieurs ? Comment la/les définir ?), les traditions du passé et celles du présent (préserver ou renouveler ?), le changement et les transformations culturelles (sont-elles souhaitables ? si oui, comment ?), le rôle des musées (usurpateurs ou protecteurs ?), et bien d’autres questions complexes et passionnantes. Aussi, nous proposons aux participants qui le veulent bien de partager leurs réflexions et témoignages avec le public. De faire entendre leur voix, quoi. C’est sur le site internet du Musée McCord que vous pourrez voir éventuellement le fruit de ces ateliers, en lien avec l’exposition permanente et la collection des Premiers Peuples.

 

Un petit avant goût ? La semaine dernière,  en regardant la photo d’un parka féminin (amauti) hautement décoré de perles, une participante inuit rencontrée au refuge du PAQ nous a expliqué, dessin à l’appui, la signature des femmes son village (Kangiqsualujjuaq) quant à la façon de coudre les perles sur leurs kamiik (bottes en peau de phoque). Avec un groupe de femmes inuit rencontrées au Métro Atwater, et qui sont originaires des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut et du Nunavik, nous avons eu une discussion animée sur leurs divers styles d’uluit (couteaux féminins de forme semi-circulaire), objets du quotidien indispensables (une des participantes nous a même montré le sien, tout droit sorti de son sac à main), mais aussi un symbole identitaire marquant pour les femmes inuit contemporaines. Couper de la viande et affirmer son identité en même temps ? Bien oui, justement, me disent-elles avec aplomb, mais avec un air quand même un brin songeur.

http://www.mccord-museum.qc.ca/scripts/imagedownload.php?accessNumber=ME...

Aussi, il y eut un grand intérêt à propos des objets non-inuit, ceux des Premières Nations, une curiosité que nous avons tenté de satisfaire avec l’aide des autres participants présents à ce moment. En regardant des images de raquettes provenant de diverses communautés de Premières Nations du Québec, une des participantes nous a confié que son père les collectionne, et qu’il en a un très grand nombre provenant des quatre coins de la province. Ah oui ? Un homme inuit qui collectionne des objets traditionnels des Premières Nations ? Pourquoi pas, me dit-elle. Évidemment que ça se peut, pourquoi suis-je étonnée.

 

http://www.mccord-museum.qc.ca/en/collection/artifacts/ACC1148.1-2

 

 

Parlant d’étonnement, saviez-vous que les aurores boréales, en plus d’être magnifiques visuellement, émettent des sons et que les femmes inuit du Nunavik les imitent dans leurs chants de gorge ? Cette information que nous avons apprise dernièrement, nous avons décidé de la partager avec les participants, et d’en profiter pour leur demander s’ils ont des histoires et croyances propres à leur culture, à propos de ce phénomène.

 

de petites images d'aurores boréales et un peu de réflexion à laisser aux participants...

 

Chez les Inuit de la région d’Igloolik au Nunavut, les aurores boréales sont causées par les esprits des morts qui jouent au ballon (une sorte de ‘football’ inuit) avec des crânes de morse. Rien de moins. Pour sa part, un participant cri rencontré au refuge du PAQ nous a expliqué que ce sont les esprits qui dansent, mais qu’il faut se méfier des aurores car elles peuvent nous enlever et nous emporter à jamais. D’ailleurs, il ne faut surtout pas imiter leurs bruits pendant leur manifestation céleste, en frottant nos ongles ensemble, par exemple, car cela pourrait provoquer notre perte. Leurs bruits sont en fait une sorte de claquement . Tout le monde craint les aurores, à ses dires, même les chiens. Ces derniers se cachent et on n’en entend plus un japper dans la communauté lorsque ces lumières envahissent le ciel. Un participant Ojibwé, qui s’est joint à notre conversation, nous dit que pour sa part, il ne les craint pas, mais que d’y penser lui rappelle la première fois qu’il en a vu,  un moment magique vécu avec sa grand-mère au Labrador. Un Ojibwé au Labrador ? Bien oui, que son ami me répond, les Ojibwé sont partout, ma chère, même que ce dernier vient en fait de la Floride ! Ah, ok… Floride, Labrador, pourquoi pas. Encore une fois, je suis déstabilisée et j’en apprends.

Ce bel échange interculturel sur les aurores boréales s’est terminé en beauté lorsqu’un des participants m’a relancé la question : Et toi, Marie-Pierre ? Comment parle-t-on des aurores boréales dans ta culture ? Silence radio de mon côté… Aucune idée ! Un peu honteuse, je lui ai promis de faire une recherche et de lui revenir là dessus. En fait, la recherche, je l’avais déjà faite, mais sans m’en rendre compte. Nous, dans notre culture, on en parle avec la science. Internet regorge de sources à cet effet. Mais la science (astronomie, physique, météorologie et autres), peut-elle être perçue comme une croyance culturelle, une histoire, une façon d’appréhender le monde et de se le raconter ? Vous pouvez-être certaine que je vais soulever la question avec les participants lors de ma prochaine route !  

Découvrez d'autres récits des expériences vécues à bord d'idAction Mobile!

http://exeko.org/idaction-mobile 

 

Quand le travail rencontre l'esprit critique de la rue

Chaque semaine, les médiateurs disposent de pistes de réflexions, visuelles et philosophiques, afin de monter sur mesure des ateliers éveillant l'esprit critique et la participation citoyenne de nos participants. Nous vous partageons aujourd'hui les coulisses d'un atelier, depuis sa conception jusqu'à sa mise en oeuvre.

Par Daniel Blémur, médiateur idAction Mobile

L’atelier est structuré comme suit : 3 œuvres, peintures et photographies, sont offertes au regard et à l’analyse des participants, et sujettes à la discussion.

Imprimée en grand format, placardée à un panneau de liège, l’œuvre de Gustave Courbet, « Les casseurs de pierre » (1849), lance la médiation : que voyez-vous ?

Les Casseurs de pierre, Gustave Courbet, 1849

« Des mineurs! » « Ils recherchent de l’argent, non? » « Ils travaillent fort… » Ce tableau a fait scandale lors de sa parution. Étonnant, non? Aujourd’hui ça ne choquerait personne… Mais peux-tu deviner pourquoi? « Je le sais pas… » « Ah ouais, ÇA, ça a fait scandale ? » « Des gens ordinaires… » Oui! Des gens ordinaires, précisément. Courbet a fait scandale en faisant descendre la peinture de son piédestal, en lui faisant peindre autre chose que des rois et des reines, autre chose que des cardinaux et des aristocrates, autre chose que des grands évènements historiques ou bibliques. Sa révolution dans la peinture, c’était de peindre des travailleurs : c’était de dire « les travailleurs aussi sont des sujets dignes d’être peints ». « Eille, intéressant… » « Ouais parce que dans c’temps-là, on peignait juste les ‘grands de ce monde’, mais pas les petits… »

Sur papier glacé cartonné, une photographie d’une gravure sur pierre. Au centre, un homme placé sur un dispositif de torture, le tripalium. Autour, en Espagnol, « Bendito sea el trabajo. Dad gracias al Señor. » (« Béni soit le travail. Rendez grâce au Seigneur. ») Saviez-vous que ce qui est là, cet instrument de torture s’appelait le tripalium, et que « tripalium » est l’origine étymologique du mot travail ? Drôle d’association, non, entre le travail et la torture ?

Le tripalium

Sur le même support, une dernière photographie : l’entrée d’Auschwitz, avec l’inscription « Arbeit macht frei » (« le travail rend libre »). Qu’en pensez-vous? C’est plutôt sinistre non, comme ironie ? Mais en dehors de l’ironie, que pensez-vous de la phrase en tant que telle ? Est-elle vraie ? Et comment combiner cette association travail/liberté avec l’association travail/torture de l’image précédente?

L’atelier a été conçu, d’abord en se référant à la thématique de la semaine proposée par Dorothée, puis en puisant dans des contenus déjà élaborés dans le cadre d’idAction (Courbet avait été utilisé pour des ateliers « Art et changement social » à Listuguj), et enfin en proposant aux bénévoles d’y joindre leurs réfléxions (c’est la bénévole Maxine qui suggère « tripalium », cette origine particulière du mot travail). Cette conception de l’atelier avec les bénévoles permet déjà d’établir une chimie, une ligne commune, une compréhension des objectifs et des pistes thématiques possibles pour la médiation du jour. La confiance va déjà bon train.

Premier arrêt Atwater. Les premiers participants demandent des chaussettes, s’intéressent aux bouquins. « What do you think of this painting ? » Réaction mitigée du participant, d’origine jamaïcaine. Pour lui, ce sont des trucs d’Européens, non susceptibles de l’intéresser. Savais-tu que Courbet avait été un militant socialiste, qui avait notamment été député dans la Commune de Paris, ce grand soulèvement ouvrier et tentative d’auto-organisation ? Non, il ne le savait pas, mais déjà Courbet est un peu moins une affaire de white people, de colonisateurs jugés comme le mal tout court. Peut-être que la culture européenne n’est pas exclusivement une affaire de vainqueurs ?

Dans le métro, un participant croit reconnaître des mineurs du Yukon, me semble-t-il. Pourquoi pas? Auschwitz lui parle beaucoup. « My grandmother was there. » On échange sur les horreurs du nazisme. Mais cette phrase sur le travail, qu’en penses-tu ? « I think it’s true. I think working makes you free, but it is also a form of slavery, or torture. It’s difficult to say. » La philosophie est là, dans cette difficulté, dans cette impossibilité de trancher tout uniment, avec facilité. Pas pour notre prochain participant, par contre, assis dans l’escalier au niveau du métro : « Working makes you free ? I don’t think so. This is freedom right here, what you’re seeing now, that’s freedom. » Ça fait 20 ans qu’il est dans la rue, dans le secteur précisément. Il en a suivi les évolutions, les bouleversements. Est-ce que ça a changé ? « Oh yes, it has changed. » Plus de drogues, plus de violences : le secteur est devenu un peu plus difficile.

 

"Le travail rend libre", Auschwitz

Prochain arrêt, Ste-Catherine. Assis sur le coin, un monsieur est rapidement entouré du musée mobile. Courbet ? Intéressant, mais c’était vraiment d’époque, aujourd’hui ça ne choquerait plus personne. Mais c’est quelque chose de montrer les petits. Le travail ? Il a travaillé longtemps, oui. Ça rend libre ? En quelque sorte, de nos jours, il faut de l’argent pour s’acheter des trucs, et il faut travailler pour en obtenir. Mais lui, ça fait 20 ans (lui aussi!) qu’il est dans la rue, et il se considère beaucoup plus libre qu’à l’époque où il travaillait comme un déchaîné. Il y a beaucoup de jobs de merde, et une job de merde, c’est pas la liberté. Pas mal plus proche de la torture, en fait.

Daniel Blémur (C)Exeko

Arrêt suivant, toujours sur Ste-Catherine. Un monsieur d’origine arabe, en chaise roulante ; il lui manque une jambe. La journée est difficile, il n’a pas trop envie de participer. On lui présente le projet idAction mobile, ses options et disponibilités. « Quand vous voulez monsieur, un livre, un cahier de notes… » « Non merci, pas cette fois, mais peut-être une autre fois… » La sollicitude et le respect témoigné à son égard semble déjà amenuiser la souffrance initialement apparente. Une minute après c’est la rigolade.

En face de la rue, assis devant le AppleStore, un tout jeune homme. Courbet ? Vraiment intéressant! Ça l’allume… Tripalium, origine tortueuse et torturante du mot travail ? « C’est drôle, ça me fait penser à… t’sais là, sur les portes d’entrée des camps de concentration… » Éclat de rire et de joie collectif. Je montre la troisième photo. « Ayoye! Malade! Avouez que j’suis pas pire, hein? J’suis pas pire à faire des liens ? » On acquiesce tous en riant. Son voisin de cellule en prison était allé visiter Auschwitz, et lui avait conté la chose. Ils avaient même décidé de graver la phrase célèbre sur le mur de leur cellule.

Dernier participant, un peu plus loin sur Ste-Catherine. « C’est vraiment intéressant… » La phrase revient à deux ou trois reprises, marquant à chaque fois le plaisir de la découverte. « Eille merci beaucoup, merci beaucoup de venir m’apprendre ces choses-là… » La force vivifiante de l’exercice de l’esprit…

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  • « By engaging with people on a deep level, we see Exeko reinvigorating individual spirit to rebuild society in a new way. Exeko's work is not about small projects, but about achieving full social inclusion at a systemic level. [...] we believe that Exeko will reach a level of systemic impact with Quebec, Canada and the world within 5-10 years. »

    Elisha Muskat, Executive Director, Ashoka Canada

  • « Its goal? To develop reasoning, critical thinking, logic, and increase citizen participation of these marginalized groups. »

    Caroline Monpetit, Le Devoir (free translation)

  • «  I write my thoughts in my head, not on paper, and my thought is not lost. »

    Participant @PACQ

  • « Why use paper when it is as beautiful as this? »

    One of the co-creator for Métissage Urbain

  • « I Have my own identity ! »

    Putulik, Inuit participant, Métissage Urbain

  • « It is terrible for a society to ignore people with such talent! »

    Hélène-Elise Blais, les Muses about ART and ID projects

  • « Art has the advantage to make people talk about abilities rather than limitations, when confronted with an intellectual disability.  »

    Delphine Ragon, Community Programs Manager, Les Compagnons de Montréal

  • « Over the past few years, we have been seeing more and more high quality productions by people with an intellectual disability who truly are artists.  »

    Julie Laloire @AMDI

  • « Exeko implements creative solutions to several problematic, gives a voice to those we don't hear and hope to the underprivileged. »

    Bulletin des YMCA

  • « Its goal? To develop reasoning, critical thinking, logic, and increase citizen participation of these marginalized groups. »

    Caroline Monpetit, Le Devoir (free translation)

  • « ...empowering the children, and giving them confidence »

    APTN National News

  • « It’s a great program for children to learn about their traditions and to increase their interaction with Elders in the community. »

    Erika Eagle, Social Development Assistant with Waswanipi Brighter Future

  • « We are not higher, we are not lower, we are equal. »

    Simeoni, participant idAction Mobile

  • « Receving is good, but giving is better »

    Participant idAction@Kanesatake

  • « They're both people. We're not looking enough after people with problems, and mostly with mental health issues. Then we would have more people able to work. »

    Participant, idAction@Accueil Bonneau

  • « What better way to strengthen intergenerational ties? [...] A meeting between peers, a place for expression, learning and recovery »

    Chantal Potvin, reporter at Innuvelle

  • «  I don't know everything, but while reading it, it always bring me one step closer »

    A participant, idAction Mobile

  • «  By engaging with people on a deep level, we see Exeko reinvigorating individual spirit to rebuild society in a new way. Exeko's work is not about small projects, but about achieving full social inclusion at a systemic level. [...] we believe that Exeko will reach a level of systemic impact with Quebec, Canada and the world within 5-10 years. »

    Elisha Muskat, Executive Director, Ashoka Canada

  • «  ...empowering the children, and giving them confidence »

    APTN National News

  • «  I was completely alone today, thanks for talking to me »

    Elie, participant @idAction Mobile

  • «  They're both people. We're not looking enough after people with problems, and mostly with mental health issues. Then we would have more people able to work. »

    Participant, idAction@Accueil Bonneau

  • «  Today, the power acquired through knowledge is more far-reaching than knowledge itself. »

    André Frossard

  • « By engaging with people on a deep level, we see Exeko reinvigorating individual spirit to rebuild society in a new way. Exeko's work is not about small projects, but about achieving full social inclusion at a systemic level. [...] we believe that Exeko will reach a level of systemic impact with Quebec, Canada and the world within 5-10 years.»
    Elisha Muskat, Executive Director, Ashoka Canada
  • « Exeko implements creative solutions to several problematic, gives a voice to those we don't hear and hope to the underprivileged.»
    Bulletin des YMCA
  • « Over the past few years, we have been seeing more and more high quality productions by people with an intellectual disability who truly are artists. »
    Julie Laloire @AMDI
  • « Art has the advantage to make people talk about abilities rather than limitations, when confronted with an intellectual disability. »
    Delphine Ragon, Community Programs Manager, Les Compagnons de Montréal
  • « It is terrible for a society to ignore people with such talent!»
    Hélène-Elise Blais, les Muses about ART and ID projects
  • « I Have my own identity !»
    Putulik, Inuit participant, Métissage Urbain
  • « Why use paper when it is as beautiful as this?»
    One of the co-creator for Métissage Urbain
  • « I write my thoughts in my head, not on paper, and my thought is not lost.»
    Participant @PACQ
  • « Its goal? To develop reasoning, critical thinking, logic, and increase citizen participation of these marginalized groups.»
    Caroline Monpetit, Le Devoir (free translation)
  • « Its goal? To develop reasoning, critical thinking, logic, and increase citizen participation of these marginalized groups.»
    Caroline Monpetit, Le Devoir (free translation)
  • « Today, the power acquired through knowledge is more far-reaching than knowledge itself.»
    André Frossard
  • « They're both people. We're not looking enough after people with problems, and mostly with mental health issues. Then we would have more people able to work.»
    Participant, idAction@Accueil Bonneau
  • « They're both people. We're not looking enough after people with problems, and mostly with mental health issues. Then we would have more people able to work.»
    Participant, idAction@Accueil Bonneau
  • « We are not higher, we are not lower, we are equal.»
    Simeoni, participant idAction Mobile
  • « I was completely alone today, thanks for talking to me»
    Elie, participant @idAction Mobile
  • « Receving is good, but giving is better»
    Participant idAction@Kanesatake
  • « What better way to strengthen intergenerational ties? [...] A meeting between peers, a place for expression, learning and recovery»
    Chantal Potvin, reporter at Innuvelle
  • «  ...empowering the children, and giving them confidence»
    APTN National News
  • « By engaging with people on a deep level, we see Exeko reinvigorating individual spirit to rebuild society in a new way. Exeko's work is not about small projects, but about achieving full social inclusion at a systemic level. [...] we believe that Exeko will reach a level of systemic impact with Quebec, Canada and the world within 5-10 years.»
    Elisha Muskat, Executive Director, Ashoka Canada
  • « It’s a great program for children to learn about their traditions and to increase their interaction with Elders in the community.»
    Erika Eagle, Social Development Assistant with Waswanipi Brighter Future
  • « ...empowering the children, and giving them confidence»
    APTN National News