Le monde ne tourne pas assez, il faut tourner davantage
Submitted by Danielle Aznavourian on
Fidèle au rendez-vous depuis 2012, Exeko s’est posé place Emilie Gamelin, pour célébrer les visages de la différence avec l’organisme Sans Oublier le Sourire, organisateur pour la treizième année consécutive, du rassemblement festif « Différents comme tout le monde », ceci dans le cadre de la Semaine québécoise des personnes handicapées. Une célébration en musique, danse, jeux et activités diverses par et pour les personnes ayant un handicap physique ou intellectuel. Un événement qui souligne l’importance de « défier l’indifférence » et de sensibiliser le public à l’inclusion sociale et à la diversité.
Faire tomber les masques. Comment ? En célébrant les visages de la différence par la créativité et la réflexion critique.
Deux tables basses, des bancs, des livres, une « marelle de la différence », des livres, un arbre à vœux à garnir des souhaits de chacun.e pour une ville inclusive et accueillante, des poèmes collaboratifs à composer dédiés à Montréal, des feutres et crayons de couleur et…des masques prêt-à-colorier.
C’est tout naturellement que les participants à la fête se sont appropriés l’espace où Jose et Ducakis, deux de nos médiateurs, s’étaient installés :
« On s’est fait approprié par les gens » clament-ils.
- Avec eux l’espace prend vie et « se laisse exister ». Un, puis deux, puis trois…Voilà que les masques s’arrachent et font briller de mille étincelles les yeux des participant.e.s. J.13 ans, raconte tout en dessinant sur son masque, qu’il aime la robotique et qu’il regrette que le programme ait été supprimé dans son école. "Ils sont bleu-vert" précise-t-il en parlant de ses yeux. Il rit comme seuls les rescapés de la vie savent le faire. Comme si rien n’était plus à craindre. Et pourtant. « À l’hôpital, on m’a surnommé "The King".» Il y a de quoi. « J’ai deux tiges métalliques : je souffrais mais j’ai toujours gardé le sourire ». Il rit. Le Roi Illuminateur. Quelle rayonnante innocence et sacrée source d’inspiration.
À Montréal, il dédie ces vers (extraits) :
Montréal veut être mieux
Mais elle ne veut pas être polluée
Car Montréal est une belle ville
Puis, elle aspire à beaucoup de personnes
Montréal ne veut pas que la nature soit détruite
Car ses citoyens travaillent fort pour la protection de la Terre
Puis, elle rêve GRAND
Un groupe de jeunes percussionnistes arrive. Les 3DOUMS de l’école secondaire Louis-Riel. Ils sont là « parce que c’est important ». « On se sent tous égaux malgré la différence » et chacun.e de prendre un masque et de se lancer dans sa création artistique. Une jeune des 3DOUMS confie : « Le monde ne tourne pas assez, il faut tourner davantage ». Et joignant le geste à la parole, elle se lève rieuse et esquisse une pirouette.
Ensemble, ils composent ce poème (extraits) :
Ma ville est spéciale
Elle n’est pas cannibale
Montréal est en travaux !
Montréal veut être terminée
Mais elle ne veut pas être une ville de compétition
Car Montréal est vivante, originale, énergétique
Puis, elle aspire à être une ville multi-ethnique
Edon, ami d’Exeko, nous dédie son masque et compose une ode à Montréal :
Montréal
est une histoire
qui fait rougir les temps
Elle rime
à la clarté du temps
La fête bat son plein et l’espace Exeko ne désemplit pas. Une ribambelle de petits bouts de chou arrivent avec leurs éducatrices.Elles sont aussi aux petits soins d’un de leur camarade à besoins spécifiques. Celles-ci amusées se prêtent, entre deux pauses, au jeu de la poésie alors que la marmaille prend d’assaut masques et crayons de couleur :
- Moi je veux un masque soleil !
- Et moi un masque tout bleu comme le ciel et la mer !
- Avec des fleurs !
Montréal n’est pas inerte
Elle ne veut pas de malheureux
Car ses citoyens travaillent fort pour eux
Puis, elle rêve à ce qui se fait de mieux
Qui dit mieux, lorsqu’un groupe de femmes anglophones accompagnées par leur intervenante se joignent à nous et armées de leur sourire, sans mot dire, s’approprient le matériel de dessin. L’art a encore une fois bâti des ponts, au-delà de la différence linguistique. Quelle douce chose que d’être conquis par les visages et les coeurs des participant.e.s de la journée.
Il faut davantage de la différence pour faire tourner le monde.
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Rédaction : Danielle Aznavourian en collaboration avec Jose Fucas et Ducakis Desinat
Crédit photos : Jose Fucas